La nostalgie de la Grèce à l'aube de l'idéalisme allemand : Kant et les Grecs dans l'itinéraire de Schiller, de Hölderlin et de Hegel

Dans le mouvement de leur pensée, Schiller, Hölderlin et Hegel s'apparentent par une commune nostalgie de la Grèce. Que visait cette nostalgie? Pourquoi et comment les engagea-t-elle à se débattre avec Kant? Quel est l'enjeu de ce débat et sur quelle issue débouche-t-il? Voilà les questions qu'affronte cette étude. Il y apparait que la nostalgie de la Grèce engageait d'entrée de jeu une certaine pensée de l'art et de la Beauté. Cette pensée n'avait cependant rien d'esthétique: parlant de la Beauté, c'est de l’Être qu'ils parlaient; parlant de l'art, ils visaient le rapport de l'activité humaine à l’Être. C'est dans ce souci ontologique que s'enracine aussi, chez les trois penseurs ici interrogés, leur débat avec Kant. Quant à l'issue de ce débat, dont les Grecs et Kant dessinèrent les coordonnées, elle semble se prêter à une désignation positive et simple en son dédoublement: d'une part, chez Hegel, la métaphysique achevée d'autre part, chez Hölderlin, la pensée de l'entre-deux et de la présence finie. Mais l'auteur rend problématique cette désignation, en montrant que l'antithèse de la dialectique spéculative et de la pensée de l'entre-deux n'est simple qu'en apparence, qu'elle fait question à partir du moment où l'on est contraint d'admettre que ses deux pôles régissent déjà la démarche de Kant, et singulièrement la Critique du Jugement, que l'itinéraire de Schiller et celui de Hölderlin s'inscrivent dans leur tension, qu'à celle-ci les écrits de jeunesse de Hegel ne sont pas étrangers, et qu'enfin la confrontation du cheminement de Hölderlin et de celui de Hegel fait apercevoir entre ces deux pôles une quasi-coïncidence. Comme cette tension et cette quasi-coïncidence définissent l'espace même où se meut la pensée de Heidegger, c'est de celle-ci qui l'auteur s'est nourri pour appuyer et éclairer son interrogation.